Les décibels et les octaves (7)

tubeokC’était un message tagué sur un mur à Montréal, tout près de l’affiche annonçant la prestation d’Alain Morisod et des Sweet People… «Amis suisses, si vous ne venez pas rechercher votre gros, on vous envoie nos chialeuses!»

Les chialeurs et les chialeuses, ça m’a paru bien trouvé. La larme est émouvante, et les chagrins sincères sont la clé de sol des plus belles effusions. Mais les cris qui cherchent les plus puissants aigus, caprices de bambins à la Migros, donnent envie de se travailler les tympans au tison. Depuis le début de ces chroniques, quelques amis m’accusent de mauvaise foi crasse: «Quand même, tu ne peux pas nier le talent de Céline Dion!»

Alors, premièrement, oui, je suis d’une mauvaise foi crasse, parler d’une quelconque objectivité en art relève d’ailleurs d’une consternante stupidité. Deuxièmement, je ne nie rien du tout. Bien sûr que Céline Dion a du talent, elle ne résiste pas trois vers à le démontrer, même quand rien dans la chanson ne le nécessite. Le talent, c’est laisser le public venir à soi, pas tout lui balancer dans la gueule, les décibels et les grands écarts d’octaves…

Je les aime, mes chanteurs à consonnes, parce que je sens bien leurs défauts, qui sont un peu les miens, parce que j’aime entendre le bruit des doigts sur la guitare, le petit souffle de l’accordéon, la respiration dans la voix. J’aime quand j’ai l’impression que la musique que j’écoute a été faite par des êtres humains, et artisanalement de préférence.

Est-il plus riche de déraper sur les «t» et les «p» que d’entonner les «a» et les «o» à pleine gorge? Bien sûr que oui, ne serait-ce que parce qu’il y a beaucoup plus de consonnes que de voyelles dans l’alphabet!

par Michaël Perruchoud

Pour ces Francomanias, La Gruyère a proposé une carte blanche à Michaël Perruchoud, écrivain, éditeur et chanteur, cofondateur du site www.cousumouche.com

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