Ebullition frappe un tout grand coup en accueillant Frank Turner, ce mercredi soir. Après avoir rempli les plus grandes salles anglaises, le chanteur folk promet une performance très généreuse et énergique. Une soirée qui s’annonce exceptionnelle, selon le programmateur Flavien Droux.

par Laurent Rumo 

Après le poisson d’avril, Ebullition présente le poisson de mai. Il s’agit même d’un tout gros poisson et point de farce. En programmant Frank Turner, le club bullois a réussi une pêche miraculeuse. Le chanteur folk britannique fera l’honneur d’une visite bulloise ce mercredi soir, quelques jours seulement après avoir bouclé une tournée triomphale en Angleterre.

Si son nom n’est pas encore très familier en Suisse romande, cela ne saurait tarder. Car le jeune homme présente un C.V. à faire pâlir ses pairs. Après avoir débuté dans un groupe de punk hardcore, il se met à son propre compte en 2005. Cheveux courts, guitare acoustique: Turner s’assagit. En apparence du moins. Du punk de ses débuts à un folk rock d’essence plus lisse, il a toujours gardé le même mordant.

Parfois contestataire, le plus souvent très engagé, il a réussi à conquérir le cœur des Britanniques. Jusqu’à remplir les 12000 places de la Wembley Arena, il y a une année, et jouer à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Londres. Rien que ça.

Ce mercredi à Bulle, il présentera son cinquième album Tape deck heart, qui fait cette semaine une entrée fracassante à la 2e place des charts, le classement officiel des albums en Angleterre. Comment passer des plus grandes salles du Royaume-Uni au minuscule Ebullition? Petit entretien téléphonique avec l’étoile montante.

Vous venez de terminer une série de concerts en Angleterre. Comment abordez-vous la partie continentale de votre tournée?
Avant la Suisse, nous avons commencé par deux dates en Belgique et en Allemagne. En Europe, les choses se passent bien pour moi, mais le phénomène est encore supérieur au Royaume-Uni. Du coup, j’ai la chance de jouer dans des lieux encore plus intimes sur le continent. Je préfère me produire dans ce genre de salles parce qu’il est plus facile d’y faire un bon concert. Réussir une bonne performance dans un stade demande plus de travail.

Après votre fameuse prestation en ouverture des Jeux olympiques, ressentez-vous des attentes plus élevées pour ce nouvel album?
Evidemment, je suis conscient d’être plus écouté depuis ce moment-là. L’attention qui m’est portée a également pris des proportions énormes. Mais, je n’aime pas utiliser le terme «attentes». Il s’agit déjà de mon cinquième album et je ne m’inquiète plus vraiment de savoir ce que les gens peuvent en penser. Je me concentre sur ce que je veux produire. Et du coup, je ressens beaucoup moins de pression.

Malgré ce succès grandissant, vous donnez constamment cette impression de vouloir rester en dehors du star system. Pour quelles raisons?
Mon idée de la musique et la raison pour laquelle j’en joue sont claires: j’aspire à créer une sorte de conversation entre personnes d’une même communauté. Selon moi, les musiciens ne forment pas une classe s’adressant à une autre classe. Les gens qui font de la musique n’ont rien de différent des gens qui l’écoutent. Je n’ai aucune retenue envers mon public, et je ne voudrais jamais arriver à pareille situation. Je n’ai aucune envie d’arriver à mes concerts en limousine avec une équipe de sécurité. Ce n’est simplement pas ma personnalité.

Vous pensez réellement pouvoir rester fidèle à cette idée avec votre nouvelle notoriété?
On ne cesse de me répéter que ça ne peut pas durer, depuis des années. Mais jusqu’ici, j’ai toujours réussi à rester accessible à mon public. Donc oui, je suis convaincu que c’est possible. D’ailleurs, j’essaie toujours de venir boire une bière au bar après mes concerts. Ce sera le cas à Ebullition.

A Bulle, vous allez jouer dans une salle minuscule. Le public ne connaîtra pas forcément votre répertoire par cœur. Comment allez-vous gérer cette situation, très différente de ce que vous vivez en Angleterre?
Je prends ça comme une chance de me faire découvrir. Vous savez, j’ai tourné pendant des années dans des petites salles où il fallait crier pour être entendu. Je suis habitué à ce genre de situations et je trouve ça vraiment cool. Mon job est de faire en sorte que chacun se sente bien pendant et après le show.

«On nous l’a proposé!»

Ebullition a l’immense honneur d’accueillir Frank Turner pour sa seule date en Suisse romande. Comment Flavien Droux, le programmateur, s’y est-il pris pour convaincre pareille tête d’affiche à venir se produire dans une salle si confinée? «Je connais bien son agent en Suisse. Il sait qu’Ebullition peut accueillir des productions plus importantes. Il m’a dit qu’il souhaitait tourner dans de plus petites salles. C’est même lui qui est venu me le proposer. Quand on m’a dit ça, je n’ai pas pu résister. Programmer Frank Turner, ça me semblait être de l’ordre du rêve.»

Complètement euphorique à l’idée de recevoir la star anglaise, Flavien Droux concède avoir bénéficié d’un traitement de faveur: «Comme il souhaitait pénétrer le marché suisse romand, il nous a demandé un cachet tout à fait raisonnable.»

Et le jeune programmateur de prévenir: «Très honnêtement, je ne pense pas qu’on le retrouvera dans de si petites salles à l’avenir. Je doute fort qu’il se produise à nouveau devant un parterre de 300 personnes, à vingt francs l’entrée. A Ebullition, ce sera le dernier moment de le voir avant que ça explose totalement. Certains vont se mordre les doigts de ne pas être venus.»

Au niveau de la billetterie, les ventes n’ont toutefois pas été frénétiques: «Je pensais faire complet très rapidement. A l’heure actuelle, il reste encore des places. Mais il va y avoir une promo de dernière minute qui devrait permettre de vendre les derniers billets. Quoi qu’il en soit, nous rentrons dans nos frais avec les ventes déjà enregistrées.»

Infos: www.ebull.ch