Des toiles contemporaines pour raconter l’âme de Bali

La Distillerie présente les œuvres poétiques de Sugita, jeune peintre indonésien affranchi, à la créativité ardente et inspirée.Sugita©C.Lambert

par Jean Godel

Dès demain et jusqu’au 13 avril, La Distillerie, à Bulle, inonde ses sombres cuves désaffectées des couleurs intenses de l’artiste indonésien Sugita. Bali l’île des Dieux est un magnifique voyage dans l’imaginaire balinais de ce père de famille discret de 34 ans, diplômé de l’Institut des arts de Denpasar. Cette exposition est la première et la plus grande à lui être entièrement consacrée.

Sugita, c’est la rencontre séduisante entre une civilisation millénaire et un geste moderne, maîtrisé et assumé. «Il est rare qu’un artiste contemporain sache magnifier à ce point sa propre culture», dit de lui Christian Dupré, responsable de la galerie bulloise. Bali l’île des Dieux est d’ailleurs la première expo d’un cycle intitulé Mémoires du monde et que La Distillerie nourrira d’autres accrochages.Sugita©C.Lambert

Sugita habite à Ubud, centre culturel et religieux de Bali, cette île hindoue dans une Indonésie massivement musulmane. Cette homme simple, loin des modes dont il ne se soucie pas, y cultive un rapport intense et révérencieux à la nature, élément fondamental de son œuvre. Ses toiles montrent des arbres monumentaux dont les épaisses canopées accueillent des hommes minuscules qui s’y perdent.

Des forêts profondes comme le ventre de l’île où les humains chassent le papillon, dressent des torches, cueillent, jouent ou font du vélo… Des scènes nocturnes de chaînes humaines dansant au clair de lune, noyées dans des bleus sombres, illuminés. Il y a là une interprétation poétique de ce temps insulaire. Un temps que l’on devine passé et dont Sugita semble un brin nostalgique.

Parfois, le cadre se resserre sur des mélis-mélos de couleurs qui structurent la toile et jouent de leurs teintes profondes, épaisses, toujours chatoyantes. Ainsi cette récolte dans les feuillages que quadrillent des échelles et des lianes sur lesquelles des personnages s’amusent en équilibre. A l’opposé, des grands angles révèlent des ballets joyeux de figurines multipliées, danseuses, têtes de chats ou bicyclettes. Une belle inventivité, jamais gratuite, toujours innervée de sève locale.

Fasciné par les femmes
Les femmes sont l’autre source d’inspiration de Sugita, lascives, mutines, toujours belles, dans des postures à la Gauguin. Parfois déroutantes, comme ces grands formats aux silhouettes très occidentales, à mille lieues de l’imagerie folklorique. Ou ces variations de visages – pour certains quasi christiques – et de coiffures baptisées avec humour Hair style. Des femmes énigmatiques qui nous regardent plus que nous n’osons les observer.

La peinture de Sugita est de ces œuvres attachantes, personnelles, qui racontent vraiment un lieu, une île et son âme.

Au final, la peinture de Sugita est de ces œuvres attachantes, personnelles, qui racontent vraiment un lieu, une île et son âme.

Artisanat indonésien
A noter aussi une très belle sélection d’artisanat indonésien, notamment des objets en rotin des meilleurs artisans vanniers de Lombok et Bali. Un art de la vannerie vieux de 10000 ans auquel sera consacré un atelier enfants-adultes animé par Michel Quebatte (26 mars). Le 3 avril, Georges Breguet donnera une conférence intitulée «Souvenirs d’un chasseur de textiles». Ce spécialiste des tissus indonésiens a l’une des plus grandes collections de textiles au monde dont il présentera quelques pièces.

Enfin, le 5 avril un théâtre de marionnettes tout public inspiré de la pratique balinaise sera donné par Ruth Frauenfelder, initiée au théâtre d’ombres. A noter que le vernissage, demain dès 18 h, aura lieu en présence de Sugita.

Bulle, La Distillerie, du 14 mars au 13 avril, du jeudi au dimanche, de 14 h à 18 h. www.ladistillerie.ch

Sugita©C.Lambert

 

 

 

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