Le pantin Pinocchio, avec vents et marées

CO2© MRSamedi à La Tour-de-Trême, le Quintette Eole présentait – en première suisse – son adaptation française de Pinocchio, dans la version conte musical de Lior Navok. Sur un kiosque à musique qui cache deux trappes à surprises, cinq musiciens embouchent leurs instruments bizarres, ainsi décrits par le narrateur: une drôle de «pompe à vélo» (Martine Grandjean à la flûte), une «grosse branche de chocolat» (Yuji Noguchi à la clarinette), un «tuyau de cheminée» (Nicolas Michel au basson), une «trompette spaghetti» (Stéphane Mooser au cor) et un étrange «bâton de réglisse» (Bruno Luisoni au hautbois). Avec Alexandre Rion au piano et Laurent Gendre à la baguette, le quintette à vent fribourgeois s’est mis au service de la célèbre histoire écrite par l’Italien Carlo Collodi dans les années 1880.

Ceux qui attendaient du compositeur israélien une écriture contemporaine auront été déçus. Tout au contraire, et sans doute pour ne pas effrayer parents et enfants avec des dissonances ou autres modernités, Lior Navok a plutôt composé une musique de cinéma des années cinquante, qui aurait très bien pu accompagner les classiques de Walt Disney (et c’est là tout de même un compliment).

Sur la scène du CO2, la Gruérienne Céline Cesa s’est muée en manipulatrice de marionnette pour donner vie à un Pinocchio plus vrai que nature. Grâce à son jeu sobre et plein d’enthousiasme, elle est parvenue à disparaître derrière le pantin, que les derniers rangs de la salle auraient peut-être aimé voir un petit peu plus grand…

Voyage initiatique
Avec ses deux complices Salvatore Orlando et Benjamin Knobil, tour à tour comédiens et narrateurs, elle embrigade ce brave Pinocchio dans son voyage initiatique. Bien que quelques scènes aient été écartées, le petit bonhomme de bois rencontre le Grillon-qui-parle, le Renard et le Chat, la fée (avec sa voix mâle) et, bien sûr, l’antre de la baleine, sommet insurpassé de l’inventivité de Collodi.

Geneviève Pasquier a rendu Pinocchio à ce point crédible que plusieurs enfants (sans doute un peu trop jeunes) ont sangloté leur frayeur, notamment lorsque le pantin a perdu ses jambes devant l’âtre brûlant.

Avec une mise en scène subtile et pleine de trouvailles – une pluie de bulles de savon pour évoquer la mer, l’agrandissement du nez en ombres chinoises – Geneviève Pasquier a rendu Pinocchio à ce point crédible que plusieurs enfants (sans doute un peu trop jeunes) ont sangloté leur frayeur, notamment lorsque le pantin a perdu ses jambes devant l’âtre brûlant.

Cent trente ans après leur publication, Les aventures de Pinocchio restent d’une actualité incroyable. Les thématiques de la pauvreté, de la tentation, de la désobéissance, de la naïveté, de la tristesse n’ont rien perdu de leur justesse. Seule la morale qui en découle a parfois un peu moins bien vieilli aux oreilles d’enfants nés au IIIe millénaire.

par Christophe Dutoit

 

 

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