The Clash, un phare toujours en brasier

Trente ans après sa dissolution, The Clash distille toujours une influence majeure sur la musique anglo-saxonne. Le coffret intégral Sound system revient sur ces sept ans de furie qui ont changé la face du rock.
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par Christophe Dutoit

Aujourd’hui, The Clash se résume, pour la majorité, à une poignée de chansons fiévreuses, redécouvertes au travers de spots publicitaires (la mythique pub Levi’s au début des années 1990 avec Should I stay or should I go) ou de reprises parfois très réussies (The guns of Brixton en version bossa-nova par Nouvelle Vague ou London calling en ouverture du concert de Springsteen à Hyde Park).

A l’évidence, ce brûlot punk consumé en sept ans de rage a laissé des traces profondes sur l’ensemble du spectre musical actuel. La sortie de l’intégrale Sound system et de son lot de cadeaux bonus arrive donc à point nommé pour se replonger dans l’histoire de cette révolte née à deux pas de Notting Hill, dans la banlieue jadis miséreuse de Londres.

Après avoir lancé des pavés sur la police au mitan des seventies, Joe Strummer, Mick Jones et Paul Simonon forment The Clash pour survivre à la morosité qui mine un West End traumatisé par les bombes de l’IRA et les nombreuses grèves. 

Génération No future
Plutôt que des pierres, le groupe balance les futurs hymnes de cette génération qui se croit sans avenir. Avec White riot, The Clash emboîte le pas à la vague punk qui déferle depuis New York et convainc n’importe quel béotien qu’il peut tenir fièrement une basse et devenir l’icône des masses. Ce sera le cas de Paul Simonon, qui n’avait jamais touché un instrument avant de former The Clash. Mais le jeune blanc-bec apprend vite et recycle les rythmes jamaïquains qui ont bercé son enfance dans le quartier black de Brixton. Bingo.

Par chance, le groupe tient en Mick Jones son étalon musical, sorte de réincarnation blafarde et déjantée de Keith Richards avec quinze ans de décalage. Comme dans tous les couples mythiques du rock, l’alchimie prend avec son alter ego Joe Strummer, parolier et chanteur charismatique qui passe pour un intellectuel en regard du chanteur des Sex Pistols.

Comme un gang
Travailleurs forcenés (on est loin du cliché du branleur junkie), The Clash s’astreint à une discipline de fer. Chaque journée d’enregistrement débute par un match de foot à cinq contre cinq, avec tout le clan. «A l’époque, on vivait ensemble comme un gang. On ne sortait pas dans les nightclubs. Tout tournait autour de la musique», explique Joe Strummer dans la série de documentaires intitulés Audio ammunition.

Après sept ans d’énergie foudroyante, le groupe est rongé par les tensions. L’addiction à l’héroïne du batteur signe le début de la débandade en 1982, suivi du clash avec Mick Jones, parti formé Big Audio Dynamite.

Le phénix ne renaîtra jamais de ses cendres, bien que Mick Jones rejoignît en novembre 2002 Joe Strummer sur scène, un mois avant le décès du chanteur d’une crise cardiaque. Il ne reste aujourd’hui qu’à se replonger dans cette discographie, simplement indispensable.

The Clash, Sound system, Sony

 

The Clash (1977)

clashclashLe premier. Après avoir écumé quelques salles poisseuses en compagnie des Sex Pistols, The Clash sort son premier album éponyme en avril 1977. Encore très influencés par The Ramones – la figure tutélaire du punk américain – les Londoniens déversent leur rage revendicatrice et invitent à la rébellion avec des titres énergiques comme White riot (qui se classe quand même au 38e rang du hit-parade anglais), London’s burning ou I’m so bored with the U.S.A.

L’album reçoit des critiques dithyrambiques de la presse anglaise, à l’image de Mark Perry qui écrit dans Sniffin’ Glue: «L’album Clash est comme un miroir. Il reflète toute la merde. Il nous montre la vérité. Pour moi, c’est l’album le plus important jamais sorti.» Le penchant du groupe pour le ska et le reggae est déjà fortement présent dans leur version de Police & thieves, reprise nerveuse du Jamaïquain Junior Murvin, qui fait sensation dans le Tout-Londres blanc. Fin 1977, les Sex Pistols se consument lamentablement. Mais The Clash ne fait que s’envoler.


 

London calling (1979)

clashlondoncallingLe chef-d’œuvre. Sur la lancée de son premier disque, The Clash engage un nouveau batteur, Topper Headon, qui va assurer une nouvelle assise métronomique au groupe. Surtout, le quatuor préfère expérimenter des sonorités inconnues plutôt que de recreuser le même sillon. Sorti en novembre 1978, Give ’em enough rope est un échec commercial et frustre même un certain nombre de fans. Inlassables travailleurs, les Londoniens remettent l’ouvrage sur le métier et enregistrent leur chef-d’œuvre en 1979. Dès ses premiers riffs rageurs, London calling transpire sa morve, avec les paroles uppercut de Joe Strummer contre la fuite en avant de l’humanité («a nuclear error, but I have no fear / ’cause London is drowning and I live by the river (une erreur nucléaire, mais je n’ai pas peur / parce que Londres se noie et j’habite près de la rivière»). Ce double album vendu au prix d’un simple regorge de perles telles The guns of Brixton, chantée par le bassiste Paul Simonon, ou Train in vain, interprétée par le guitariste Mick Jones au sommet de son art.

 

Combat rock (1982)

clashcombatrockLe succès. Entre deux tournées harassantes, The Clash trouve le temps d’enregistrer, en 1980, le triple album Sandinista! (lui aussi vendu au prix d’un simple, le groupe cédant ses royalties sur les 200000 premières copies). Fidèles à leurs aspirations, les «Four horsemen» varient les plaisirs avec des chansons qui mêlent rhythm and blues, jazz, soul, gospel, rockabilly, calypso, dub et même rap, que The Clash découvre dans les bas-fonds de New York (The magnificent seven et sa basse chaloupée si caractéristique).

Lorsque sort Combat rock en 1982, les tensions sont à leur comble au sein du band, qui n’a rarement été aussi impétueux sur scène, notamment lors du passage au mythique Shea Stadium de New York, devant 90000 spectateurs. Avec des titres comme Should I stay or should I go (qui deviendra N°1 aux charts américains une décennie plus tard lors de sa réédition) ou Rock the casbah, dont le sulfureux clip vidéo montre un Juif et un Arabe en plein délire sur fond de pétroparodie.

 

 

 

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