Gabriel Rolón, dans la tête du psychanalyste

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Pablo Rouviot est un psychanalyste dont les méthodes et les théories peu conventionnelles lui valent l’adulation de ses étudiantes et la méfiance du corps médical. Sa subtile connaissance des méandres de l’âme humaine ne l’empêche pas d’être interloqué lorsque Paula Vanussi débarque dans son cabinet avec cette curieuse requête: Je veux que vous aidiez l’assassin de mon père. Fille d’un grand entrepreneur, la belle Paula cherche à protéger son frère Javier des foudres de la justice, bien que celui-ci ait confessé le crime. Mais Javier est atteint d’une étrange pathologie mentale.

Gabriel Rolón signe avec La maison des belles personnes son premier roman, un thriller qui permet au lecteur d’entrer dans la tête du psychanalyste.

Sollicité pour rédiger un rapport d’évaluation psychiatrique concluant à l’irresponsabilité pénale de Javier, Pablo sera confronté à de troublants indices qui le conduiront à mener une véritable enquête policière chez les notables de la capitale argentine. Confronté à des menaces diffuses mais de plus en plus prégnantes, le psychanalyste obsédé par la vérité aura tôt fait de constater que derrière la prétendue respectabilité de Roberto Vanussi se dissimule une réalité beaucoup plus sordide. A l’image des faits qui se sont déroulés derrière les volets clos de cette paisible maison des belles personnes, dans un quartier huppé de Buenos Aires.

 

Lui-même psychanalyste et figure médiatique majeure en Argentine, Gabriel Rolón signe avec La maison des belles personnes son premier roman, bien qu’il ait déjà un best-seller à son actif avec Histoires de divan, recueil de diverses expériences professionnelles. Intitulé Los Padecientes (Ceux qui souffrent) dans sa langue originale, La maison des belles personnes est un thriller qui permet au lecteur, une fois n’est pas coutume, d’entrer dans la tête du psychanalyste. Point de revolver dans les poches de Pablo Rouviot: son arme, c’est sa capacité à décortiquer les non-dits, à interpréter les paroles et les gestes au-delà de leurs apparences. A l’instar de celle du héros qui souffre de sa séparation d’avec Alejandra, la construction des personnages repose sur leurs fêlures et révèle petit à petit la complexité de leur psyché.

Paula, Javier, le collègue José, l’assistante Helena, la violoniste adolescente surdouée Camila qui travaille inlassablement son Concerto en mi mineur de Mendelssohn, le flic Bermúdez… tous les protagonistes, loin d’être monolithiques, se révèlent attachants. L’intrigue, haletante à souhait, comprend tous les rebondissements nécessaires à ce type de littérature, avec un zeste d’érotisme en guise d’assaisonnement. Les quelques faiblesses – clichés machistes et traits caricaturaux – sont contrebalancées par d’authentiques informations sur le monde de la psychiatrie et de la psychanalyse. Et ce n’est pas un mal que de s’éduquer un brin tout en se divertissant. Les aficionados du Dr Carl Lightman de Lie to me et d’Aaron Hotchner de Criminal Minds apprécieront. Sans le côté «bourrin» des séries américaines, mais avec un supplément de subtilité et d’exotisme sud-américain bienvenus.

Efficace et passionnant

 

Rédigé à la première personne, découpé en quatre parties subdivisées en courts chapitres de quelques pages, ce roman saura offrir un grand plaisir de lecture même au lecteur occasionnel à qui un livre tombe facilement des mains. Ce n’est pas là, certes, une grande œuvre littéraire, mais un divertissement efficace et passionnant. En tant que tel, il serait malvenu de bouder son plaisir.

Fragment de dialogue dans la chambre à coucher:
– Éteins la lumière, chéri(e)!
– Attends, encore quelques minutes…
– Alors, ça vient?
– Juste quelques pages…
A force de grignoter, le lecteur du dimanche (ou du samedi soir) sera le premier étonné d’être parvenu si vite à la page finale de ce page turner qui fait jeu égal avec les meilleurs best-sellers américains du genre. Sans doute au détriment d’une bonne nuit de sommeil ou de quelque autre activité essentielle. Mais réjouissez-vous, Madame, Monsieur, car l’heure de votre vengeance va bientôt sonner: ce livre, vous l’emprunterez, et à votre tour vous succomberez. Et ce soir-là, c’est votre main qui commandera l’interrupteur.

 

par Marc Luthy

Gabriel Rolón
La maison des belles personnes
Belfond / 380 pages
notre avis: ♥♥♥♥

 

 

 

 

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