Après vingt ans de scène, La Ruda a décidé d’entonner le mot fin. Sa tournée d’adieux s’arrête à Ebullition vendredi, pour son dernier concert en Suisse.

par Yann Guerchanik

«Après dix albums, plus de 250000 exemplaires vendus, 1000 concerts et quelques centaines de milliers de kilomètres parcourus, La Ruda a décidé d’inscrire le mot “fin” à son activité musicale au terme de l’année 2012. Née en 1993, elle aura alors 20 ans et il sera temps pour elle de céder la scène, fière d’un destin accompli.»

Les huit membres du groupe annonçaient la couleur en décembre 2011, sur leur page Facebook. Une longue liste de commentaires doux-amers n’a pas tardé à rendre hommage à ces vieux de la vieille. Pas fâchée, mais parce qu’il est temps, La Ruda débranche. Avant, le groupe a prévu de faire la fête une dernière fois. Une ultime tournée l’emmène des salles de France à Ebullition, ce vendredi, pour ce qui sera son dernier concert en Suisse.

Au lendemain d’une prestation à Montpellier (vendredi dernier), Pierrot, le chanteur du groupe, nous confiait son émotion: «On s’est offert un dernier tour d’horloge en jouant les prolongations. Un dernier adieu au public avec l’enthousiasme et l’envie, parce que c’est à cela que ressemble La Ruda. On voulait d’une fin choisie, pas d’une fin subie. A chaque ville, on souffle une bougie, mais le public est là, chaleureux. Alors on est heureux.»

Vieux morceaux réveillés
Pierrot connaît sa chance: «On est des privilégiés puisqu’on a pu vivre de notre passion, trouver un public, une audience. Sur la tournée, certains ne viennent pas forcément voir le groupe, ils viennent pour saluer une dernière fois parce que La Ruda a représenté une période de leur vie. Les salles sont pleines, c’est un énorme plaisir de finir comme cela.» Concrètement, le groupe de Saumur proposera une heure quarante-cinq de concert.

«On a réveillé beaucoup de vieux morceaux, pioché dans tous nos albums, pour faire un kaléidoscope de ce que nous avons été, explique le chanteur. Un ensemble cohérent, pas un pot-pourri!» Il y a six mois, les membres défendaient davantage le dernier album, Odéon 10-14 sorti en 2011.

Aujourd’hui, ils jouent les morceaux «que les gens ont envie d’entendre». Le groupe, qui a navigué du ska festif au rock cuivré, est sorti d’une période acoustique. «Certains titres sont ainsi retravaillés, mais, pour la plupart, ils sont joués bruts de décoffrage, comme on les aimait. Avec Odéon 10-14, on a rallumé les amplis et les guitares, on est revenus à nos premières amours. Là aussi, la boucle est bouclée.» Le concert s’annonce donc comme «une osmose entre les acquis de l’acoustique, le côté chanson et l’aspect très rock’ n’roll à l’ancienne».

«On se fait plaisir et le public s’y retrouve», résume Pierrot. Et comment voit-il l’après, quand tout sera fini au soir du dernier concert, le 15 décembre? «J’aimerais bien le savoir moi-même! Ce n’est pas un choix de carrière. D’autant qu’on sait que le train ne passe souvent qu’une seule fois en musique. Quand je me poserai la question dans quelques mois, je dirai peut-être: mais pourquoi je me suis compliqué la vie, je faisais un truc qui me plaisait!»

Des liens qui vont rester
En attendant, «il va bien falloir gagner sa croûte», comme il dit. Pour sa part, Pierrot ne se voit jamais très loin de la musique et de l’écriture. «Mais La Ruda, c’est l’histoire d’une génération, d’une longue percée. On a commencé dans les bars. C’est une aventure qu’on fait à 20 ans, plus forcément à 40.»

Humainement, les liens restent forts entre les membres du groupe. «La Ruda, c’est des familles qui se connaissent. Nos enfants vont continuer à se voir, nos femmes pareil, on va continuer de boire le coup, de faire des projets, de parler de musique. Et l’on va se souhaiter d’avoir du talent et du succès, pourquoi pas?»

Bulle, Ebullition, vendredi 2 novembre, 22 h, avec Jacko (CH) en première partie