Massimo Rocchi, l’art et la manie de dénicher la suissitude

«La Suisse se cache dans les détails», estime Massimo Rocchi. L’humoriste berno-italien était de passage jeudi à La Tour-de-Trême

par Eric Bulliard

Ses premiers mots: «J’suis Suisse.» Tout découle de là. De cette étrange situation: Massimo Rocchi est Suisse et heureux. Alors que ça ne se fait pas, ça ne se montre pas. Et le voici parti à nous expliquer pourquoi, en Suisse, il vaut mieux cacher son bonheur.

Avant de revisiter l’histoire de son pays d’adoption (il est né en Italie), en créant un tourbillon qui, jeudi soir, n’a pas eu de peine à emporter la salle CO2. Drôle de spectacle, ce RocCHipédia, à la fois sobre et étourdissant. Seuls éléments extérieurs: une bande-son avec cloches et youtse, ainsi qu’une barrière, utilisées uniquement en introduction et conclusion. Massimo Rocchi tient près d’une heure cinquante avec son seul bagout, son talent pour raconter des histoires, sa finesse d’observateur de la suissitude.

«C’est comme ça»
Une fois lancé, ce comique volubile ne s’arrête plus, multiplie incises et digressions. On croit le perdre, on peine à le suivre et le voilà qui retombe sur ses jambes, reprend son fil, funambule en équilibre entre politique, économie et petites manies. «La Suisse se cache dans les détails» relève Massimo Rocchi. Cette façon, par exemple, de poser beaucoup de questions, mais d’avoir pour seule réponse (passons sur la version en bärntütsch): «C’est comme ça et puis c’est tout!»

Massimo Rocchi déclenche le rire autant par son texte que par ses mimiques, son accent, ses traductions approximatives de l’allemand, ses imitations d’animaux…

On ne peut résumer, encore moins raconter RocCHipédia. La plupart des gags paraîtraient presque quelconques s’ils étaient lâchés par un autre. Massimo Rocchi déclenche le rire autant par son texte que par ses mimiques, son accent, ses traductions approximatives de l’allemand, ses imitations d’animaux… Le comédien berno-italien mêle ses différentes expériences (ses études de lettres comme son apprentissage du mime) pour créer un one man show à part: une sorte de cabaret d’une puissance comique redoutable.

De Morgarten au Tattoo
Pris dans ce torrent verbal, le spectateur passe d’Adam et Eve à Morgarten et Sempach, via une réflexion sur la peau du cervelas, quelques piques contre Blocher et Berlusconi, avant une description hilarante des armées européennes qui défilent au Tattoo de Bâle… Massimo Rocchi a aussi l’art de mettre le doigt sur nos curieuses habitudes d’homo helveticus: ces sacs-poubelles différents d’un canton à l’autre, ces chantiers d’autoroutes si bien éclairés la nuit qu’on dirait des discothèques… On sort de RocCHipédia grisé par ce flot de paroles, avec un autre regard sur nos us et coutumes. Avec, aussi, le sentiment d’avoir appris quelque chose: qui savait que le premier passeport suisse datait de 1915 et qu’il était vert?

 

 

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