Qui parle de crise du livre?

C’est la déferlante annuelle: cet automne, 646 romans seront publiés en France. Premier tour d’horizon des livres qui devraient faire parler d’eux.

par Eric Bulliard

Année après année, Livres Hebdo publie des chiffres qui donnent le tournis: le magazine professionnel annonce la sortie cet automne de 646 romans en France (et donc chez nous). Contre 654 l’année dernière (et combien dont on se souvient?) et 701 en 2010 (et combien d’oubliés?). Légère baisse, mais toujours des kilos et des kilos de papier, des dizaines de perles à découvrir et encore plus d’historiettes aussi vite lues qu’oubliées…

Les incontournables
Depuis vingt ans, pas une rentrée littéraire sans elle: on va revoir sur tous les plateaux télé Amélie Nothomb, qui publie Barbe Bleue (Albin Michel). Christine Angot aussi est de retour: dans Une semaine de vacances (Flammarion), l’auteure de L’inceste évoque à nouveau la pédophilie, dans la langue crue qui a fait son succès. Toujours dans la catégorie vedette médiatique, Florian Zeller sort La jouissance (Gallimard) et Laurent Binet (remarqué avec HHhH, son premier roman, en 2010) a suivi la campagne de François Hollande pour écrire Rien ne se passe comme prévu (Grasset).

Les valeurs sûres
Trois des écrivains français les plus intéressants du moment seront de cette rentrée: Patrick Modiano publie L’herbe des nuits (Gallimard), Jean Echenoz sort 14 (Minuit) et Pascal Quignard Les désarçonnés (Grasset). Peu de surprises à en attendre et encore moins de risques de déception: s’il ne fallait en lire que trois, voilà un excellent choix. Très attendus aussi les nouveaux Philippe Djian (Oh, Gallimard), Tahar Ben Jelloun (Bonheur conjugal, Gallimard), Olivier Adam (Les lisières, Flammarion, déjà cité comme favori au Goncourt) et Véronique Olmi (Nous étions faits pour être heureux, Albin Michel). Dans le genre très à la mode du roman inspiré de faits réels, Laurent Gaudé se penche sur la vie d’Alexan­dre le Grand (Pour seul cortège, Actes Sud), Patrick Deville sur l’extraordinaire trajectoire d’Alexandre Yersin, découvreur du bacille de la peste (Peste et choléra, Seuil), alors que Lionel Duroy enquête sur les enfants de criminels de guerre (L’hiver des hommes, Julliard) et Stephane Zagdanski s’inspire librement de l’affaire DSK (Chaos brûlant, Seuil).

De révélations en confirmations
Les temps seraient-ils plus durs pour les jeunes écrivains? La baisse du nombre de publications concerne essentiellement les premiers romans, 69 cette année, contre 74 en 2011, 85 en 2010 et encore 121 en 2004… Aurélien Bellanger, avec Théorie de l’information (Gallimard) se présente comme LA révélation. On le considère déjà comme le nouveau Houellebecq, à qui il a consacré un essai (Houellebecq, écrivain romantique). Si Les Inrockuptibles le disent… Parmi les plus éclatantes révélations de ces dernières années, on attend les nouveaux romans de Jean-Michel Guenassia, auteur du Club des incorrigibles optimistes, en 2009 (La vie rêvée d’Ernesto G., Albin Michel), de Tristan Garcia (Les cordelettes de Browser, Denoël) ou encore de Mathias Enard (Rue des voleurs, Actes Sud).

La légère baisse du nombre de publications concerne surtout les premiers romans: ils étaient encore 121 en 2004 et «seulement» 69 cette année.

En traduction
Quelque 220 romans traduits en français vont paraître cet automne. Et parmi eux, du très lourd: Salman Rushdie (Joseph Anton. Mémoires, Plon) évoque la fatwa qui lui a pourri l’existence, Jim Harrison a choisi un titre qui semble le qualifier lui-même (Grand maître, Flammarion) et Philip Roth évoque une épidémie de polio dans le New Jersey (Nemesis, Gallimard). Une curiosité: le premier roman adulte de J.K. Rowling, auteure de Harry Potter (Une place à prendre, Grasset). Trois Prix Nobel sont au rendez-vous, avec un roman pour Orhan Pamuk (Le musée de l’innocence, Gallimard), son Journal 2001-2003 (Actes Sud) pour Imre Kertész – soit les années qui ont entouré la récompense suprême ­– alors que Toni Morrison s’est intéressée à la ségrégation en Amérique (Home, Christian Bourgeois).

En Suisse
Du côté romand, on attend avec intérêt Les lignes de ta paume, de Douna Loup (Mercure de France), qui avait marqué les esprits avec L’embrasure (2010), son premier roman. Basées à Charmey, les Editions de l’Hèbe annoncent un nouveau livre de la Veveysanne Ma­rie- Claire Dewarrat (Zones de quiétude) ainsi que Plaisirs au pluriel, recueil de textes brefs de la toute jeune Angélique Botti (20 ans). Chez Zoé, la rentrée est marquée par Le mineur et le canari, de Catherine Safonoff, Le rêve des naturels, de Marie Gaulis, et Rose Envy, de Dominique de Rivaz. Bernard Campiche annonce, entre autres, Le cadeau de Noël, deuxième roman de Daniel Abimi (après le polar Le dernier échangeur en 2009) et Les hommes s’appellent Mohammed, de Sylvaine Marguier. Enfin, forte présence fribourgeoise à L’Aire, qui prévoit une quinzaine de nouveaux titres (!), dont des livres de Jean-Bernard Fasel (Le moine et la putain), de Michel Bavaud (Lettres orphelines), d’Alain Favarger (Magnétique Amérique) et de Jean Winiger (De si jolis yeux).

 

 

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