Après avoir raconté l’interview d’un assassin – c’était son premier roman – et la mort annoncée d’un convive à la soirée mondaine d’une famille noble sur le déclin, – c’était Le crime du comte Neville – quel sujet sombre et cruel Amélie Nothomb pouvait-elle bien explorer avec sa feinte légèreté coutumière? Dans Frappe-toi le cœur, malgré son prénom Marie (anagramme d’aimer), une femme jalouse ne parvient pas à aimer sa propre fille. A sa manière jusqu’au-boutiste, et munie de sa phrase aérienne, Amélie Nothomb observe les états d’âme de la petite Diane avide d’attention mais ignorée par une mère indifférente. Pourtant Marie aime son fils, et pousse même le vice jusqu’à étouffer d’amour sa deuxième fille, Célia.
Victime blessée de la jalousie, Diane se montre capable de ne pas en accabler la petite Célia, mais se montrera moins magnanime le jour de sa rencontre avec une adolescente honteusement méprisée par sa mère et dévorée par la passion, comme elle. Tout le roman tend vers sa fin glaçante, ou satisfaisante, c’est selon. Fort heureusement, même s’il se réfère à une réalité et donne une envie furieuse d’étudier la psychanalyse, ses personnages sont de papier, et ne peuvent pas vraiment saigner.
Par Laurence de Coulon
Amélie Nothomb, Frappe-toi le cœur, Albin Michel, 182 pages