Steve Toltz et les perdants pas si magnifiques

TotzDans la lose, il est le roi. Le maître absolu de la dèche, le dieu de la débine. Aldo a tout essayé pour s’en sortir: en entrepreneur né, il a lancé des t-shirts (trois exemplaires vendus), une ligne de vêtements pour femmes enceintes gothiques, des pastilles à la menthe pour chiens, un service de taxi-cabine de bronzage… D’autres échecs de son existence se révèlent moins drôles, mais constitutifs d’une personnalité tellement à part que son ami Liam, flic et écrivain contrarié, entreprend de raconter ce parcours improbable.

L’Australien Steve Toltz se régale à l’évidence avec ses personnages de misère. Il y ajoute des remarques drôles et plus ou moins oiseuses sur l’art, distillées par un vieux prof de Liam et Aldo, et pousse très loin la cruauté envers ce perdant pas si magnifique. Etrangement construit, avec de longues incises comme la confession d’Aldo au tribunal, Vivant, où est ta victoire? amuse par les saillies de son antihéros face à son destin: «L’amour envers Dieu relève du syndrome de Stockholm», lâche-t-il à la Cour. Et à Liam qui lui demande ce qu’il aimerait vraiment, il répond: «Voyager dans le temps et stériliser mon grand-père.» Parfois, son désespoir prend la forme d’illuminations poétiques: «Vous entendez le silence? C’est le son de mes aïeux qui se demandent à quoi bon s’en mêler.»

Par Eric Bulliard

Steve Toltz, Vivant, où est ta victoire?, Belfond, 480 pages

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