Au Théâtre des Osses, comme au temps des tréteaux

 Avec «Les deux timides», le Théâtre des Osses met le classique à la portée du jeune public. Dans une mise en scène épurée et pétillante.
Par Eric Bulliard

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Du théâtre à l’état pur. Les deux timides, que le Théâtre des Osses présente à Givisiez jusqu’au 24 mars, prennent des allures de retour aux sources. A l’époque des tréteaux et du simple bonheur du jeu.
Gisèle Sallin souhaitait depuis longtemps mettre un classique à la portée de tous les publics, en particulier du plus jeune (dès 8 ans). Pour ce faire, elle a choisi Labiche, son humour sans âge, ses trames limpides. La metteure en scène en profite pour parcourir tout un pan de l’histoire du théâtre, la tradition de la commedia dell’arte rejoignant celle du vaudeville français.
Créée en 1860, la pièce se fonde en effet sur une tradition séculaire, avec ses rebondissements, ses amours empêchées, ses personnages typés. A l’image de ce père qui veut marier sa fille contre son gré. Sauf qu’ici, il n’a rien du froid barbon: il est timide, maladivement. Au point de ne pas pouvoir dire non. Ce Thibaudier n’a ainsi pas eu le courage de refuser la main de sa fille Cécile à ce beau parleur d’Anatole Garadoux (Xavier Deniau).

Le rire et l’observation
Mais la sémillante demoiselle (interprétée avec fraîcheur par Anne Schwaller) a d’autres visées: elle aime Jules Frémissin, jeune avocat qui souffre du même handicap que son père. Autant dire que la rencontre entre les deux timides, incarnés avec jubilation par Yann Pugin et Olivier Havran, se révèle irrésistible… et finement observée: au-delà du rire, Eugène Labiche sait ausculter les caractères humains avec pertinence.
Avec un minimum de décor (des pendrillons, quelques accessoires tombés du ciel), la scène, vide, apparaît comme une boîte noire. Par contraste, les costumes éclatent de couleurs et les fleurs sont éparpillées pour souligner la vivacité de Cécile.

En rêve, tout est possible
Les comédiens se régalent, derrière leurs demi-masques qui introduisent une mise à distance et accentuent encore l’impression de naïveté des personnages. Voire de pantins, manipulés par leur timidité, leur amour ou, pour Anatole, leur suffisance.
Avec la chorégraphe Tane Soutter, Gisèle Sallin a choisi de transposer les chansons de la pièce pour créer une deuxième réalité. Un rêve où les timides osent tout, où les amoureux transis avouent leurs sentiments. Là encore, pas d’effets tape-à-l’œil: un simple changement d’éclairage suffit.
Pour le reste, on retrouve dans cette courte pièce (une heure environ) la précision, le sens du rythme du Théâtre des Osses et sa manière de trouver des détails qui font mouche, comme ce mouvement récurrent de la robe d’Annette, la femme de chambre (Emmanuelle Ricci). Derrière l’apparente simplicité, Les deux timides se révèlent aussi épurés que pétillants.
Givisiez, Théâtre des Osses, jusqu’au 24 mars. Vendredi à 20 h, samedi à 17 h, dimanche à 11 h et 17 h. Réservations: 026 469 70 00. www.theatreosses.ch

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