Myriam Anissimov, portraits entre intimité et drames de l’histoire

Elle a voulu être la première à voir Le fils de Saul, le film de Laszlo Nemes qui descend «dans les abysses de la belle Europe». C’est que Myriam Anissimov, née en 1943 dans un camp de réfugiés en Suisse, est restée intimement marquée par la Shoah. «Cette horreur ne me quittait jamais complètement. Elle était là, comme la basse continue de mon existence.»

La sortie du film la replonge dans le passé: Les yeux bordés de reconnaissance tracent le portrait de trois hommes, avec la Seconde Guerre mondiale en toile de fond. Jeune femme, Myriam Anissimov rencontre un Romain Gary vieillissant, désespéré et séducteur. «On ne pouvait échapper aux yeux de Gary.» Elle croise ensuite Sergiu Celibidache, chef d’orchestre roumain qui a vécu la montée du nazisme: «Sergiu n’avait aucune sympathie pour les nazis, mais il n’était pas un héros.» Le troisième, son oncle Samuel Frocht, lui aussi musicien, a été emporté par la guerre. A force de persévérance («un Juif qui a de la patience finit toujours par apprendre où sa famille a été exterminée»), elle retrouve la trace de ses derniers jours, l’accompagnant «un peu plus loin» comme en lui tenant la main dans les ténèbres. Au-delà des simples souvenirs, la quête devient intime et poignante.

Par Eric Bulliard

Myriam Anissimov, Les yeux bordés de reconnaissance, Seuil, 240 pages

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