Guy Delisle: rêves d’évasion

s-enfuirChristophe André travaille pour une ONG dans le Caucase, en Ingouchie. Lors de sa première mission, alors qu’il dort seul au début du mois de juillet 1997, un commando fait irruption dans sa chambre et l’emmène de force, torse nu et sans pantalon. Après des premières heures d’incertitude – «Vont-ils voler le coffre-fort de la mission, me torturer ou me tuer?» – il est transbahuté de l’autre côté de la frontière, en Tchétchénie. Sa geôle consiste en une pièce vide de meubles, aux fenêtres barrées. Un matelas, un radiateur, une paire de menottes: le quotidien de l’humanitaire français se transforme en enfer de la solitude, attaché en permanence.

Avec S’enfuir, Guy Delisle, habitué à se mettre en scène dans des ouvrages comme Chroniques de Jérusalem ou Pyongyang, raconte la captivité vécue par Christophe André. Chaque case, dans sa construction répétitive, sa «vacuité», fait ressentir au lecteur cette attente, ces jours qui passent, toujours les mêmes, cette lutte contre l’ennui, contre l’abrutissement. Poignant, angoissant, parfois drôle, ce «récit d’un otage», réussit l’incongru: raconter l’absence d’action. Et faire de ce manque un message en bande dessinée.

Par Romain Meyer

Guy Delisle, S’enfuir, récit d’un otage, Dargaud

 

Posté le par Eric dans BD Déposer votre commentaire

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