En visite dans l’atelier de Bruno Baeriswyl

Des œuvres de Bruno Baeriswyl sont exposées dans les lieux qui abritaient son atelier, de 1985 à sa mort en 1996, dans l’actuel Musée Gutenberg.Beariswyl ©MR

par Eric Bulliard

Des craies durcies, inutilisées depuis dix-sept ans. Des pinceaux, une odeur de térébenthine, des disques de jazz. Et des œuvres de Bruno Baeriswyl, «de retour chez lui», comme l’affirme le titre de l’exposition: de 1985 à sa mort en 1996, le peintre a occupé ces lieux devenus le Musée Gutenberg en 2000.

Une quarantaine d’œuvres sont exposées dans deux salles du rez. Toutes ont été réalisées ici. Au cours de cette décennie féconde, le peintre et sculpteur fribourgeois travaille essentiellement en mouvements concentriques, si larges, que, dans leur élan, ils dépassent souvent le cadre du tableau. Le mouvement se retrouve intégré dans la vraie vie. Tout comme la réalité s’intègre au tableau par l’utilisation de la cendre, entre autres.

L’exposition dépasse la simple présentation de tableaux. Elle permet de se retrouver dans l’intimité de l’artiste, avec son tabouret rouge, sa boîte à cigares devenue pot à pinceaux.

Montée en collaboration avec l’Association des amis de Bruno Baeriswyl, propriétaire des œuvres, l’exposition dépasse la simple présentation de tableaux. Elle permet de se retrouver dans l’intimité de l’artiste, avec son tabouret rouge, sa boîte à cigares devenue pot à pinceaux.

L’atmosphère est emplie d’une rigueur étonnante au vu de sa peinture échevelée. L’atelier a d’abord été reconstitué de manière plus anarchique, relève Stefan Ledergerber, directeur du Musée Gutenberg. «Sa veuve nous a dit que ce n’était pas comme ça, que Bruno était très ordré.» Sur des chevalets, quatre peintures inachevées se révèlent particulièrement émouvantes. Y figure l’ultime œuvre de Bruno Baeriswyl, à laquelle il travaillait jusqu’à ses dernières forces.

Monumentaux bas-reliefs
Des photos d’époque témoignent de la justesse de la reconstitution. On y voit l’artiste au travail, barbe fleurie, silhouette massive. «Pour le Musée, ces images ont une valeur de témoignage sur le bâtiment», relève Stefan Ledergerber. En ajoutant que les murs de molasse et les poutres ont pu jouer un rôle dans l’évolution de l’artiste vers les tons terreux: «Les couleurs que l’on voit ici se retrouvent dans ses œuvres.»brunob

Une vitrine revient également sur l’extraordinaire sculpture de la galerie Placette-Manor, à Fribourg. Avec l’aide de Willy Dougoud et Marcel Deriaz, Bruno Baeriswyl a réalisé deux bas-reliefs formés de 4200 briques peintes. D’une hauteur de 3,6 mètres, ils mesuraient 25 et 10 mètres de long. Il a fallu un an pour créer cette œuvre inaugurée en 1988… et presque entièrement démontée lors de la construction du cinéma multiplexe.

Le goût des séries
Dans la salle Gemperlin, une vingtaine d’œuvres sur papier rappellent le goût de Bruno Baeriswyl pour la série, pour les bleus tourbillonnants. Trois dessins ont été réalisés par terre, le crayon gras reproduisant le relief du sol. Trois autres prouvent son intérêt pour la gravure et les matériaux, puisque le peintre a fabriqué lui-même ses papiers.

De gravure, il en est aussi question avec ces blocs de bois taillés. Grâce à une presse genouillère du Musée, les visiteurs sont invités à choisir un modèle pour repartir avec une gravure de Baeriswyl. Une curiosité, puisque certaines de ses matrices sont utilisées pour la première fois.

Fribourg, Musée Gutenberg, jusqu’au 25 mai, mercredi, vendredi et samedi 11 h-18 h, jeudi 11 h-20 h, dimanche 10 h-17 h. www.gutenbergmuseum.ch

 

En quelques dates

11 août 1941. Naissance de Bruno Baeriswyl. Onzième de douze enfants, il grandit à la rue d’Or, en Basse-Ville de Fribourg.

1956. Découverte de Paul Klee, au Musée des beaux-arts de Berne, où l’a emmené Albin Kolly, son maître de dessin. Une autre figure de la Basse, le peintre (et laitier) Ernest Riesemey a exercé une influence déterminante.

1961. Première exposition au sein du groupe Mouvement. Il reçoit une bourse fédérale des Beaux-Arts en 1962, 1963 et 1969.

1968. Exposition au Musée d’art et d’histoire de Fribourg (MAHF), qui lui consacrera aussi une rétrospective en 1975.

1974. Ouverture de la Galerie RB, avec Michel Ritter, futur directeur de Fri Art.

1985. Il installe son atelier dans les locaux de l’actuel Musée Gutenberg.

1988. Inauguration des deux bas-reliefs en céramique (100 m2) de la galerie Placette, à Fribourg.

1989. Réalisation de la sculpture Le coureur de Morat, avec Emile Angeloz. Elle remplace le tilleul, en face de l’Hôtel de Ville, et suscite la polémique.

23 octobre 1996. Mort à 55 ans, des suites d’un cancer.

2001. Nouvelle exposition au MAHF.

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