Damien Murith, un premier coup de maître

luneMéfions-nous des premiers romans. On les lit avec bienveillance, avec l’espoir de découvrir une nouvelle voix, fût-elle encore un peu maladroite, hésitante. Après tout, c’est un premier roman. Méfions-nous. Il peut arriver que l’on se retrouve d’emblée soufflé. Comme avec cette Lune assassinée, signée Damien Murith. Né en 1970, cet enseignant fribourgeois réussit cet automne une magnifique entrée en littérature. Un premier roman, donc, très court, mais d’une intensité exceptionnelle.

A coups de brefs chapitres (le plus souvent quelques lignes seulement), Damien Murith taille une histoire au scalpel. Dans ce village de campagne, un drame se tisse sur fond de tromperie, de haine alcoolisée et de rancoeurs. Il y a là Pierre, Césarine, la Vieille, la Garce. Et l’usine, le bistrot, la campagne, l’hiver, du sang et du brouillard jaune.

Il y a, surtout, une rigueur absolue dans cette langue elliptique et âpre, au parfum ramuzien. Et cette impression de toucher à l’os, de mêler le lyrisme des images à la justesse de l’observation. Pas un mot de trop, dans cette prose poétique dense, concentrée, au rythme parfait, qui sait dire le poids de ce «village, comme une teigne» et de ses habitants «usés, râpés, cassés, la figure creuse, la douleur muette, traînant derrière eux un siècle d’âmes vaines et encore plus loin, tout autour, la plaine, à l’infini, comme les restes d’une promesse ».

Par Eric Bulliard
Damien Murith, La lune assassinée, L’Age d’homme, 112 pages

notre avis: ♥♥♥♥

Posté le par Eric dans Littérature Déposer votre commentaire

Ajouter un commentaire