Le péril jauniste

Sans remonter à Piero della Francesca, la provocation fait depuis longtemps les beaux jours de l’art occidental. Après le fameux Urinoir de Duchamp (1917), il a même été érigé en dogme par quelque plasticien.

Que penser alors du geste de Vladimir Umanets, un Russe de 26 ans, dont l’imbécillité n’a visiblement pas attendu le poids des années. Dimanche, le courageux esthète a graffité l’une des toiles de Mark Rothko exposées à la Tate Modern de Londres.

Arrêté lundi, ce corniaud qui se veut lettré a défendu ainsi son acte: «Ce n’est ni de l’art ni de l’anti-art. Je ne suis pas un vandale. Je suis un jauniste! Je voudrais que les gens en parlent…» Ben, voyons! Il ne nous manquait plus que le péril jauniste!

Personnellement, j’avais souri lorsqu’une admiratrice avait laissé, en 2007, un baiser rouge à lèvres – réversible celui-là – sur une toile blanche de Cy Twombly. Mais, de là à sprayer à la bombe un Rothko, il y a un monde contre lequel le bon sens doit s’ériger. Oui, l’art doit poser des questions. Oui, l’art doit pousser dans les cordes les limites de la liberté d’expression (ce ne sont pas les Pussy Riot qui me contrediront). Mais, cher Vladimir, pas question de toucher à un Rothko! N’y a-t-il pas assez de murs en béton sur cette planète pour une telle ignominie?

Christophe Dutoit

 

 

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